GBU-57 contre Khorramshahr-4 : le bras de fer nucléaire est lancé
Washington frappe les installations nucléaires iranienne, Téhéran riposte. Vers un embrasement régional ou une accélération de la fin de la guerre ?
Tôt dans la matinée du 22 juin 2025, les États-Unis ont lancé une série de frappes aériennes coordonnées contre les installations nucléaires iraniennes de Fordow, Natanz et Ispahan. Selon le président Donald Trump, l’opération a impliqué six bombardiers furtifs B-2 Spirit larguant des bombes GBU-57B sur Fordow et trente missiles de croisière Tomahawk tirés depuis le sous-marin USS Georgia contre Natanz et Ispahan.
La veille on a pu sentir la tension monter malgré les tentatives de désinformation de Washington. Le décollage des avions B2 de leur base au Missouri et l’utilisation en début de soirée d’un AEW&C Saab 2000 Erieye appartenant à l’Arabie Saoudite, pour la surveillance du Sud de l’Iran. Etaient de bons indicateurs de la proximité de l’alerte. Le déplacement deux jours plus tôt de l’ensemble des avions américains qui se trouvaient sur la base aérienne d’al Udeid au Qatar, vers la base aérienne Prince Sultan en Arabie Saoudite, montre à quel point le royeaume est impliqué.
De leurs côtés les iraniens avaient pris des mesures préventives la veille pour dissimuler les entrées du site de Fordow comme on a pu le voir sur des mages satellites.
La Maison-Blanche qualifie l’opération de « succès militaire spectaculaire », affirmant que les sites nucléaires ont été « totalement oblitérés ». L’Iran, de son côté, nie toute destruction majeure. Seule une alerte incendie à Fordow a été confirmée, rapidement maîtrisée selon Téhéran, qui dénonce une exagération américaine. Des témoignages sur place parlent d’un incendie visible pendant trois minutes.
Les images satellites montrent trois cratères d’impact, ce qui signifie que les chances que le coup ait fait des dégats soient faibles.
Ces frappes surviennent dans un contexte de tensions extrêmes au Moyen-Orient, amplifiées par des violations répétées du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah. Les frappes israéliennes sur le Liban sud et Beyrouth ces dernières semaines ont été décrites comme des provocations par les alliés de l’Iran.
En représailles directes, les Gardiens de la Révolution iraniens (IRGC) ont tiré une salve de 27 missiles balistiques vers Israël, dont plusieurs Khorramshahr-4 à moyenne portée. L’attaque visait l’aéroport Ben-Gourion, des centres de commandement israéliens, et selon l’IRGC, un centre de recherche biologique à Ness Ziona, à 20 kilomètres de Tel-Aviv. Cette dernière installation, selon des experts, aurait été impliquée dans le développement d’armes chimiques et biologiques. Une frappe par drones aurait également précédé ou accompagné cette offensive balistique.
Bilan provisoire : au moins 11 blessés à Haïfa, des dégâts matériels à Ness Ziona, et une atmosphère d’urgence à Tel-Aviv où les sirènes n’ont cessé de retentir. Le gouvernement israélien, en état d’alerte maximale, promet des « réponses écrasantes ».
Un conflit enraciné dans l’histoire
Le conflit actuelentre Israël et l’Iran montre beaucoup de ressemblances avec une guerre du passé. Le 22 septembre 1980, l’Irak de Saddam Hussein lançait ses avions, puis ses troupes au sol contre l’Iran, dans une guerre censée durer trois jours mais qui s'étendra sur huit années sanglantes. Une guerre au scénario semblable à celle d’aujourd’hui: frappes de décapitation, frappes contre des installations nucléaires, une communauté internationale soudée derrière Baghdad et l’impossibilité d’appliquer la loi internationale sur l’aggresseur. Certains spécialistes estiment d’ailleurs que l’obsession de Téhéran d’acquérir la bombe atomique et un programme de missile provient du caractère “injuste” de la guerre Iran-Irak, l’histoire donnera peut-être raison aux iraniens.
Aujourd’hui, les lignes de confrontation s’étendent du au Liban, du détroit d’Hormuz au cœur d’Israël.
Fractures politiques à Washington, menaces sur la région
À Washington, ces frappes ne font pas l’unanimité. Plusieurs parlementaires, y compris républicains, critiquent l’absence d’autorisation du Congrès et redoutent une spirale incontrôlable. Trump, lui, menace de nouvelles frappes si « la paix ne revient pas rapidement ».
De son côté, l’Iran promet une réponse « proportionnelle et stratégique », n’excluant pas la fermeture du détroit d’Hormuz, par où transite près d’un tiers du pétrole mondial. Le spectre d’une guerre régionale ouverte est désormais plus que probable.
Mais en réalité, les iraniens semblent maîtriser la guerre des nerfs et ne vont probablement pas tomber dans le piège de la vengeance qui justifirait une entrée en guerre totale et permanente des USA.
Aux États-Unis : fracture politique
À Washington, les frappes contre l’Iran divisent.
Plusieurs élus dénoncent une absence de feu vert du Congrès, et craignent une escalade incontrôlable.
Trump, de son côté, promet d'autres frappes si la paix n’est pas restaurée « immédiatement ».
Analyse stratégique
Objectif américain : frapper avant que l’Iran n’atteigne le seuil nucléaire.
Stratégie iranienne : riposte calibrée, visant à dissuader sans provoquer une guerre totale mais infligeant des pertes proportionnelles chez les énnemis.
Risque majeur : embrasement régional, avec implication possible de nouveaux acteurs, et risque de fermeture du détroit d’Hormuz.
Ce qu’il faut surveiller
Réactions d’Israël : escalade ou pause stratégique ?
Réactions de l’Iran : poursuite du travail de sappe ou pause stratégique ?
Réactions de l’Iran (Face aux USA) : Réplique directe ou indirecte ?
Position des États du Golfe : soutien discret ou neutralité ?
Attitude de Washington : nouvelle opération ou désescalade ?
Impact sur les cours du pétrole et les routes maritimes.
Sources :
Al Jazeera
IRNA – Iranian News Agency